Les sportifs sédentaires : pourquoi une routine sportive ne suffit pas pour notre santé ?

Le nouveau profil du sportif sédentaire est une des conséquences de nos modes de vie toujours plus optimisés et organisés. En dédiant des temps contraints, limités et cloisonnés à nos différentes activités que ce soit le sport, le travail, ou le loisir, on a tendance à se réserver un moment limité pour le sport, en pensant se faire du bien, mais en oubliant d’intégrer du mouvement dans l’ensemble de notre journée. Pourtant faire du sport tout en étant assis et inactif pendant tout le reste de la journée serait tout aussi délétère pour notre santé que ne pas faire assez de sport ou avoir une mauvaise alimentation. La sédentarité est un véritable facteur de risque à part entière qui n’est malheureusement pas supprimé ni incompatible avec les bienfait d’une activité physique à un autre moment de la journée. C’est tout le paradoxe du sportif sédentaire.

Si vous suivez une routine sportive régulière, comme aller à la salle de sport, courir ou faire du vélo, c’est une excellente nouvelle, car aujourd’hui on sait que l’activité physique a de multiples effets bénéfiques sur notre santé physique et mentale. En revanche on est souvent moins informé sur les effets néfastes pour notre santé de passer le reste de la journée en position assise, que ce soit au bureau ou à la maison.

« 95% de la population française adulte est exposée à un risque de détérioration de la santé par manque d’activité physique ou un temps trop long passé assis. »
— ANSES, 2022

Evidemment on ne vous encourage pas ici à arrêter votre activité physique et votre routine sportive, bien au contraire. Cela serait encore pire car les effets négatifs de la sédentarité s’ajouteraient à l’absence de sport, et vous gardez évidemment les bienfaits de l’activité physique pour votre santé. Cependant on veut vous sensibiliser à l’idée que cette activité ne vient pas compenser le fait d’être sédentaire et que si on veut un peu améliorer son bien être et sa santé globale, cela passe bien par de l’activité physique, mais également par la réduction du temps passé assis inactif.

Comprendre le phénomène du sportif sédentaire

Être un "sportif sédentaire" signifie pratiquer une activité physique régulière, mais être majoritairement inactif et assis le reste du temps. En effet, il ne suffit pas de faire du sport quelques heures par semaine pour compenser les effets délétères d'une journée passée assis. Par exemple, une personne qui s'entraîne une heure par jour, mais qui reste assise 8 à 10 heures devant un ordinateur, est considérée comme sédentaire. La sédentarité c’est le temps passé avec un métabolisme proche de celui du repos, en position assise ou allongée. C’est à dire des moments d’inactivité et d’immobilité. Ce comportement présente des risques pour la santé, malgré les efforts fournis durant les séances de sport. Cela correspond aux moments de transport (bus, métro, voiture…), de travail derrière un ordinateur ou en réunion, mais également de loisirs (TV, jeux vidéos, lecture…). Plus ce temps assis sans bouger est prolongé plus il y a un risque pour la santé.

Des études ont montré que l’absence de mouvements musculaires provoque des modifications profondes de notre métabolisme. Des chercheurs ont observé qu’au bout de quelques jours de sédentarité extrême, les personnes, sans problèmes de santé initiaux, présentaient des dérèglements métaboliques identiques à ceux observés chez les personnes diabétiques ou obèses. D’après certains travaux, augmenter d’une heure le temps assis chaque jour accroît de 22 % le risque de devenir diabétique et de 30 % celui d’être obèse.

La sédentarité prolongée et ininterrompue entraînerait en effet une résistance à l'insuline, un dysfonctionnement vasculaire, un changement dans les fibres musculaires et l’utilisation des hydrates de carbone, une réduction de la capacité cardiorespiratoire, une perte de masse musculaire et osseuse, et une augmentation de la masse grasse totale et du dépôt de graisse viscérale, des concentrations de lipides dans le sang et de l'inflammation.

Les dangers cachés de la sédentarité prolongée

On a donc compris que l'exercice était essentiel pour maintenir une bonne santé, mais rester inactif le reste du temps serait tout autant à risque de problèmes. Voici quelques-uns des risques associés à la sédentarité, même chez les personnes actives physiquement à d’autres moments de la journée :

  1. Complications cardiovasculaires
    La sédentarité augmente le risque de développer des maladies cardiovasculaires. Rester assis trop longtemps entraîne une mauvaise circulation sanguine, une accumulation de cholestérol et une élévation de la pression artérielle, augmentant ainsi les risques d'hypertension, et de certaines maladies cardiovasculaires. Selon une étude de 2020, les personnes qui passent plus de 8 heures par jour assis ont un risque de mortalité cardiovasculaire augmenté de 17 % par rapport à celles qui sont plus actives.

  2. Ralentissement du métabolisme et augmentation du risque de diabète de type 2
    L'inactivité prolongée réduit la dépense énergétique de base. Le corps brûle moins de calories, favorisant ainsi la prise de poids, même chez les sportifs : les individus sédentaires avaient un risque d’obésité multiplié par deux par rapport à ceux qui étaient physiquement actifs tout au long de la journée. De plus, l'activité des enzymes qui décomposent les graisses diminue, ralentissant ainsi le métabolisme des lipides et des glucides. Le manque d’activité physique entraîne également une diminution de la sensibilité à l’insuline, augmentant ainsi le risque de développer un diabète de type 2. Encore une fois, les études montrent quun mode de vie sédentaire augmentait le risque de diabète de type 2 de 112 %.

  3. La santé mentale une exception ?
    Concernant la santé mentale les résultats sont plus contradictoires, certaines études rapportaient un risque augmenté de dépression chez les personnes sédentaires et d’autres ne montraient pas cette augmentation. Une analyse globale de ces résultats nous explique cette incohérence : en terme de santé mentale il faut distinguer les comportements sédentaires “mentalement passifs”, tels que regarder la télévision, qui pourraient augmenter le risque de dépression et la sédentarité “mentalement active” qui n’augmenterait pas ce risque et pourrait même prévenir la dépression dans certaines situations.

  4. Risque accru de mortalité précoce et augmentation du risque de certains cancers
    Une étude très sérieuse publiée en 2021 a montré que la sédentarité serait responsable de 6 à 9 % des décès prématurés dans le monde, ce qui équivaut à environ 5,3 millions de décès par an. La sédentarité, même chez les personnes pratiquant une activité physique régulière, est liée à un risque accru de mortalité prématurée. La seule activité sportive, aussi intense soit-elle, ne suffit pas à compenser les effets néfastes d'une immobilité prolongée. Les observations suggèrent même que la sédentarité augmenterait le risque de certains cancers comme le cancer du sein, du côlon, et de l’endomètre (utérus).

  5. Faiblesse musculaire et douleurs articulaires
    Passer des heures en position assise contribue également à une faiblesse musculaire et à une diminution de la masse osseuse. Ce phénomène, combiné à certaines postures peuvent favoriser des douleurs par exemple lombaires et cervicales et ainsi une réduction de la qualité de vie.

Pour lutter contrer la sédentarité : ne partons pas défaitiste

Nous n’avons évidemment pas l’intention ici de vous culpabiliser ou de vous faire perdre espoir. Et si après avoir lu tout ça on peut se sentir un peu impuissant, ou découragé, ce dernier chapitre va au contraire vous prouver que plus on est informé et éclairé, plus on peut agir au quotidien pour sa santé. On va vous proposer plein de petits moyens qui peuvent vous aider à réduire votre sédentarité :

Pour prévenir les effets néfastes de la sédentarité, il est essentiel d'intégrer plus de mouvements dans la routine quotidienne, en plus des séances de sport. D’après les études, faire 5 minutes de marche rapide toutes les heures permet d'améliorer le contrôle du sucre dans le sang au bout d'un mois. Alors bien sur on ne peut pas quitter son poste de travail toutes les heures pour aller marcher, mais voici quelques stratégies simples pour rester actif tout au long de la journée :

  • Travailler debout : certains peuvent utilisez un bureau ajustable pour alterner entre position assise et debout, mais ce n’est pas forcément accessible à tous… en revanche de manière beaucoup plus facile, il est possible de marcher en téléphonant, vous pouvez tout à fait faire les 100 pas dans le couloir ou dans votre bureau lors d’appels téléphoniques.

  • Se lever et marcher toutes les heures : que vous soyez au bureau ou à la maison, levez-vous au moins une fois par heure pour marcher, vous étirer ou bouger. Même si c’est très court, c’est toujours mieux que rien. Traverser votre bureau, aller chercher quelque chose dans une autre pièce, allez vous servir un verre d’eau... Tout ce qui vous mettra en mouvement régulièrement est bon à prendre.

  • Privilégier les escaliers : abandonnez l'ascenseur au profit des escaliers chaque fois que possible pour stimuler vos muscles, si c’est une montée descente deux fois dans la journée c’est déjà 4 moments d’effort en plus.

  • Marcher ou pédaler pour se déplacer : pour les trajets quotidiens, essayez de marcher ou de faire du vélo plutôt que de rester assis en voiture ou dans les transports en commun. Et on reprendra cette phrase de santé publique bien connu “descendez une station plus tôt pour finir à pied”, ça vous change votre timing de 5 minutes mais c’est ça de pris pour votre bien être. Et pour aller un peu plus vers l’extrême, il existe maintenant des appareils portatifs à mettre sous votre bureau pour pédaler en étant assis. Il n’y pas de résultats scientifiques sur la question, et nous avons quelques réserves sur l’impact que cela peut avoir aussi bien en terme d’obsession, de pression à la productivité et d’optimisation permanente de notre temps, qui ne nous semble pas pouvoir être une solution équilibrée. Nous ne savons pas non plus quels sont les effets en terme de concentration et de réalisation de tâches simultanées, mais on voulait vous en dire 2 mots…

  • Utiliser des rappels : si vous êtes complètement absorbés dans votre tâche, c’est tant mieux et très bien pour votre mental, c’est ce qu’on appelle dans le meilleur des cas le “flow”. Mais n’hésitez pas à programmez des alarmes de temps en temps pour penser à faire des petites coupures qui vous permettent au minimum de vous lever ou de bouger un peu.

  • Profiter des pauses : utilisez les pauses que ce soit pour prendre un café, ou entre deux réunions pour simplement faire quelques pas de plus, voire même des petits exercices très simples comme des étirements. C’est ce qu’on recommande aussi un peu lors des longs courriers en avion, de penser à mobiliser et étirer ses muscles régulièrement, ce sont des petites habitudes toutes simples à prendre.

A l’inverse nous pensons que pour un bien être global nous ne pouvons pas vivre tout le temps sous pression, dans l’optimisation et la contrainte. Et nous n’encouragerons pas ici les comportements obsessionnels. Il nous semble de mauvais conseils de vous dire d’aller faire des squats aux toilettes ou de passer la journée à pédaler sur un appareil à votre pieds, la bonne santé c’est aussi l’équilibre et le respect de son corps et de son mental. Le plus important nous semble donc de prendre conscience de l’enjeu de la sédentarité pour essayer d’adapter un peu notre quotidien et d’y penser dans les actes banals de notre journée, pour nous aider à nous sentir un peu mieux. Mais il faut pas que cela se transforme en une charge mentale qui vous fait culpabiliser.

Chaque petit pas est une victoire et c’est l’accumulation de petits changements qui fait la différence à la fin. Ne sous estimez pas votre pouvoir d’agir avec des petites choses, et restez indulgent avec vous même, un jour après l’autre valorisez ce que vous faites de bien pour vous.

L'importance d’intégrer le mouvement à notre mode de vie

Le concept de sportif sédentaire nous rappelle que l'activité physique ne suffit pas à elle seule pour préserver notre santé. Pour réduire les risques liés à l'inactivité prolongée, il est crucial d'incorporer des mouvements réguliers dans notre quotidien, en dehors des entraînements sportifs. En intégrant ces petits changements, nous pouvons prévenir les effets délétères de la sédentarité et améliorer notre santé globale, tant physique que mentale : un esprit sain dans un corps en mouvement.


Sources :

  • Physiology of sedentary behavior, Ana J. Pinto, Audrey Bergouignan, Paddy C. Dempsey, Physiological Review, 2023

  • Les définitions Inactivité physique / sédentarité, quelles différences ? ONAPS, 2022

  • Activité physique et sédentarité dans la population française. Situation en 2014-2016 et évolution depuis 2006-2007, Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire 2019

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